DE BOIS-SACRE A ABBO : LE NOM DU VILLAGE
De 1873 à 1962, le village a porté deux noms : Bois-Sacré, puis Abbo avant de devenir Sidi-Daoud, nom familier à tous ses habitants puisque nos compatriotes algériens le nommaient ainsi et que c'est le nom qui était couramment utilisé dans les conversations où l'arabe était la langue d'échange entre les deux communautés. Ces deux noms français n'ont pourtant pas été adoptés aussi facilement qu'on l'imaginerait.
Lorsqu'en janvier 1872, Adraste Abbo rend compte au Gouverneur Général de ses prospections pour la fondation d'un village, il propose de façon assez diplomatique de l'appeler "Gueydonville", ce que le Comte de Gueydon décline, "au moins pendant le temps de [mon] mandat" écrit-il. Au mois de mai de la même année, c'est le Préfet d'Alger qui propose un avant-projet de création du village qu'il souhaite appeler "Abboville", ce qui sera aussi refusé par le Gouverneur, cette fois "au moins du vivant du fondateur".
Le 16 juin, une circulaire annonce l'expropriation prochaine "des terrains nécessaires pour constituer le périmètre du centre de population des Issers-Djedian, au lieu-dit le Bois-Sacré". Pourquoi ce nom ? Bois-Sacré se rattacherait à la présence, derrière la Cave Coopérative, d'un bois d'oliviers où se serait trouvé le tombeau d'un marabout local. En 1954, des travaux d'agrandissement de la Cave bouleversaient quelque peu le terrain et l'on avait construit une petite kouba probablement pour apaiser des sensibilités religieuses. En janvier 1873, juste après l'installation des "Alpins de M. Abbo", Rémus Abbo rédige une lettre-pétition qu'il date simultanément de Bou-Sikri/Bois-Sacré.
Il semblerait que le premier nom du village soit donc une déformation phonétique du nom d'un lieu-dit. Ce que pense Louis Rinn dans "Les origines berbères. Etudes linguistiques et ethnologiques". Il cite un lieu-dit : Bou Asakeri (qu'il traduit par le lieu du soldat) et il décrit un bois d'oliviers, "[...] ce bois sacré qui passe volontiers pour avoir fourni le nom donné officiellement au village créé en cet endroit [...]). Théorie un peu mise en doute par l'Abbé Marchand vers 1935 : pour lui, pas de bois sacré, mais un soldat, mort en coupant la branche sur laquelle il était assis. Lui aussi parle de Bou Askri devenu Bois-Sacré qui en tout cas devient commune de plein exercice, sous ce nom, le 1° janvier 1879.
Après le décès de son fondateur en 1898, le Conseil Municipal relança la procédure pour "Abboville" ; cette fois, c'est le Gouverneur Général Edouard Laferrière qui refusera cette appellation pour éviter toute confusion avec... "Aboutville", créé en 1889. Mais dans son dictionnaire des communes inclus dans l'édition 1908 de 'l'Algérie", Adolphe Joanne mentionnera Abboville comme "le nom officiel de la commune de Bois-Sacré qui n'a pas été adopté par l'usage". Il n'est que de voir le nombre de correspondances, dans le dossier de création du village, aux Archives Nationales d'Outremer à Aix-en-Provence, où il est question d'Abboville, voire de "village Abbo".
Finalement, et toujours suite au souhait du Conseil Municipal de voir pérenniser la mémoire du fondateur, le Préfet d'Alger proposera alors "Abbo", appellation devenue officielle au 1° janvier 1909 après avoir été entérinée par le Conseil Municipal le 15 novembre 1908.